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Le succès de Michael Jackson expliqué à ma fille (et à ses amis)... (2)

Updated: May 9, 2023

Voici la suite de mon échange, l'autre soir, avec ma fille et certains de ses jeunes amis, musiciens et apprentis ingénieurs du son; à propos du succès de Michael Jackson et de sa "valeur", à notre époque. Dans mon précédent billet, je retranscrivais les notes que j'ai prises ce soir-là suite à cette intéressante et symptomatique conversation et j'évoquais leurs interrogations quant au succès commercial de Michael Jackson. Mais ils avaient soulevé un deuxième point, sur lequel notre discussion s'est portée ensuite : la question de la notoriété. Cette célébrité était-elle si impressionnante que cela ? Etait-elle méritée et sur quoi était-elle fondée ? Voici, dans les grandes lignes, leurs biens légitimes axes d'interrogation...


OK, mais alors, si on ne parle pas de ventes et d'argent et que l'on parle de sa célébrité... Comment se fait-il qu'on raconte que même les tribus les plus reculées d'Afrique, d'Australie ou d'Amérique Centrale, qui n'avaient pas la télé, le connaissaient ? C'était vraiment à ce point ?


Tu sais, Michael Jackson a su utiliser les médias, la télé, la presse, pendant une longue période. C'est un peu paradoxal parce qu'à la fois il était partout, et en même temps, souvent nulle part... Je veux dire... Il avait peur, à une époque, de la surexposition médiatique. Apparaître partout et devenir banal était sa crainte. C'est ce qui était commencé à advenir à l'époque des Jacksons et de leurs shows télévisés parfois discutables... Il y a eu une période où il s'est effacé, autant pour se préserver que pour jouer sur le mystère, l'absence, et se faire désirer, susciter le fantasme, l'attente. Et cela a fonctionné. Il a su pendant longtemps jouer sur le fil, même si cela a fini par lui coûter cher.

Il est aussi, comme je dis souvent, l'artiste multimédia avant l'heure. Déjà enfant, il faisait les unes, il était célèbre, on le voyait sur scène, à la télé mais il avait aussi son propre personnage dans un dessin animé. C'était énorme ! En grandissant, il a exploité tous les supports possibles et même brouillé les frontières entre eux. Ses vidéos ressemblaient à des films, ses films à des comédies musicales, les spots publicitaires qu'il faisait pour Pepsi ressemblaient aussi à des vidéos, et sur scène, il convoquait tout cela en même temps et cassait les frontières entre le virtuel et le réel. On le voyait dans les magazines et il avait son fan club et des fanzines dédiés. C'était assez novateur de fonctionner comme cela, à grande échelle. Donc oui, même en vivant dans une grotte ou au fond de la jungle ou du désert, on ne pouvait ne pas avoir entendu parler de Michael Jackson. Et à une époque où l'internet et les réseaux n'existaient pas, c'était incroyable. C'est pour cela que, pour toutes les générations qui l'ont connu, comme nous, ou tes parents, tes grands-parents, cela a marqué les esprits !


OK, oui, je vois. C'est vrai que ça devait être plus difficile ! Je veux dire aujourd'hui avec TikTok, Insta et tout ça, c'est facile de diffuser des images, de partager des sons. Mais lui, sans tout ça, il a réussi à se placer à tous les niveaux ! Mais en quoi ce qu'il faisait intéressait autant et continue d'intéresser ?


Le talent, je te dirai. L'originalité, la créativité, le côté novateur, bluffant. Le fait qu'il associait de manière très efficace une musique (de qualité) et des danses (de qualité). Et qu'il conjuguait tout cela dans un "décor" de court-métrage grâce auquel, finalement, il devenait un personnage, tel un acteur. Là encore, il combinait les arts : musique, danse, cinéma, spectacle. C'est assez rare d'avoir autant de talents différents et autant d'idées. Tu sais on dit souvent de lui qu'il était bien entouré, comme s'il était un produit, un gentil petit toutou qui obéissait et faisait ce qu'on lui disait. J'exagère, je caricature, mais en fait non, il était un moteur, une force de propositions, quelqu'un qu'il fallait stopper tant il était sans limite ! Sans limite dans les idées comme dans les défis à surmonter ! Et ça, ça se ressentait. Ce qui a tant marqué les esprits concernant ses talents, c'est à la fois la qualité de ce qu'il proposait, comme le côté bluffant de ses productions. Avoir un artiste qui conjugue tout cela, ce n'est pas courant. Et à l'échelle des Etats-Unis, avoir un artiste "noir" qui conjugue tout cela, c'était exceptionnel (et gênant... mais ça, c'est un autre sujet)...

Isabelle Petitjean blog / la valeur du succès de Michael Jackson Etoile Michael Jackson Hollywood ©Isabelle Petitjean, 2010
Etoile Michael Jackson Hollywood ©Isabelle Petitjean, 2010

Vous dîtes que c'est novateur tout cela : ses vidéos, ses danses, sa manière de jouer avec les médias. Mais j'ai entendu parler de Mylène Farmer en France, qui faisait la même chose !


Certes, ce n'est pas faux. Mais c'est après. Mylène Farmer est souvent comparée à Michael Jackson en France, mais c'est, indépendamment de son talent et de ses qualités, qu'on aime ou pas Mylène Farmer, totalement incomparable...

Certes les vidéos de Farmer ont pris la dimension de courts-métrages scénarisés, mais c'est après Michael Jackson et ce qu'il a apporté dans ses films musicaux issus de "Thriller". Oui, Mylène Farmer a créé de magnifiques tableaux chorégraphiés sur scène, mais la construction de ses spectacles ne repose pas sur les mêmes intentions artistiques que Jackson. Et oui, enfin, Mylène Farmer joue avec le mystère et brille par son absence dans les médias, mais c'est, là encore, cette démarche est calquée sur celle de Michael, entre autres. Sauf que sur ce plan, elle a bénéficié de davantage d'indulgence de la part de la presse que Jackson...


Effectivement. Là encore, quand on n'a pas le contexte, ce n'est pas évident de se rendre compte. Mais je comprends mieux maintenant.


Ecoute... avec plaisir ! C'est rare d'avoir l'occasion de discuter tranquillement de ces choses-là. Alors merci à toi de m'avoir donné la possibilité d'argumenter. Si tu le permets, je vais prendre des notes pendant que j'ai notre échange en tête, parce que je me dis que, même s'il ne s'agit là que d'un point de vue, le mien, et d'un début d'explication (il y a sans doute des centaines d'éléments à prendre en compte), cela pourrait toujours servir d'en faire un article de blog. Tu es OK ?


YES !


Merci à Téva, Clothilde, Noé, Liam de m'avoir donné cette double opportunité !



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