Gary, Indiana, et Michael Jackson
Dernière mise à jour : 1 sept. 2021
De Gary, Indiana, à Michael Jackson, les entrailles d'une trajectoire vertigineuse


Je crois sincèrement qu'il faut aller à Gary une fois de sa vie, si cela est possible, autant qu'il est bien d'aller à Los Angeles marcher dans ses pas ou se recueillir à sa dernière demeure.
Cette idée ne m'était jamais apparu comme une évidence tant que je ne m'y suis pas retrouvée moi-même.
Bien sûr, le Gary de 2016 était l'ombre de celui des années 1960. Les membres de la famille qui étaient là et avec qui nous avons discuté nous ont raconté la désertion progressive de cette ville dont la plupart des habitations - surtout dans le quartier de Michael, donc à proximité de l'usine où tout le monde, y compris son père, travaillait - ont les fenêtres fermées par des planches cloutées, comme dans les films, et semblent délabrées.
Mais il faut y aller, au moins traverser la ville en voiture, pour mesurer à quel point il n'est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche. Il faut aussi et surtout se poster en face de cette minuscule maison, car elle est vraiment minuscule, pour mesurer la trajectoire qu'il a effectuée pour s'extirper de là. De ce petit trou de souris, on prend mieux la mesure des sommets qu'il a atteint. Quand on est passé, avant, à Los Angeles, ou, peut-être, quand on s'est approché de Neverland (ce qui n'a pas été mon cas, par choix), et qu'on passe à Gary, qu'on contourne, en quelques petits pas, cette maisonnette de poupée où ils vivaient si nombreux, on comprend qu'il n'a pas seulement fait quelques milliers de kilomètres vers l'Ouest, mais aussi quelques milliards de kilomètres, à la vitesse de la lumière, vers une autre galaxie.
Je suis passée à la maternité où il est née et qui ressemble à un désert. J'ai tenté d'y capter l'air, l'endroit, l'esprit...
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Je suis passée près de l'école que la fratrie fréquentait, où ils ont chanté...
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Près de l'usine et du terrain vague, juste derrière la maison...
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Moi qui suis née dans la vallée de la Fensch (Florange et Arcelor Mittal, tout le monde en a entendu parler) à une époque où l'industrie lorraine était pourtant florissante, et qui n'ai jamais pu m'y sentir ni bien, ni chez moi, il m'a semblé tout à coup que ma ville d'origine était Monaco, à côté de Gary.
Mais en voyant que, comme moi, Michael avait grandi, durant ses premières années, à côté d'une usine, je me suis dit qu'il avait dû entendre les mêmes bruits de machines qui me faisaient peur, la nuit. Ses sonneries de véhicule qui n'en finissaient pas, le bruit des cheminées qui dégazaient, l'odeur de soufre ou de coque (la seule chose que j'aimais, bizarrement), et je me suis dit que, sans le savoir, tout cela avait dû s'inscrire en lui et peut-être faire un écho en moi, dans une sphère inconsciente et reptilienne que nul ne maîtrise ni ne perçoit vraiment avec l'intelligence ou les sens.
Je ne savais pas tout cela, mais il y avait quelques étranges parallèles dans cette enfance où la musique passait avant tout, même avant l'école, où les heures de travail devaient s'aligner, se rattraper si elles n'étaient pas faites, être émargées dans des cahiers sous l'œil et la pression d'un parent qui misait tout sur vous...
Quoi qu'il en soit, en allant à Gary et en m'attendant à ce que Michael y soit naturellement célébré (comment aurait-il pu en être autrement ?), je suis tombée de haut...